Exercice 2 : "Aujourd'hui, en 2020"

Intentions

Objectifs pédagogiques :
travail spécifique de la structure et de son optimisation, grâce à :
un scénario de pénurie de ressources ;
un programme exigeant (en terme de portée, de hauteur, de charge, etc.) ;
intégration architecture – structure – technique (organicité) ;
préparer aux conditions de travail de demain ;
se positionner dans le prolongement de l'exercice précédent tout en soulevant de nouvelles questions et exigences.

Une autre justification, non purement pédagogique, de ce choix est la suivante. Les défis écologiques auxquels nous dev(r)ons faire face étant globaux, on pourrait penser que la réponse que l'humanité y apportera doit être d'office globale elle aussi, à l'échelle des gouvernements. En réalité, le niveau d'action des individus et de leurs réseaux a également un rôle à jouer, complémentaire au précédent. En effet, les gouvernements étant soumis à l'influence des lobbys industriels, leur action en faveur de changements qui touchent à l'organisation de l'économie est ralentie.

Un futur austère

Principe
L'idée consiste à se projeter dans le contexte d'un futur proche, et non une anticipation trop radicale.
Par exemple 2020, dans 10 ans.
Développons quelques lignes de forces possibles de ce contexte futur.

Perturbations climatiques
Canicules estivales. Vent et pluviosité augmentent, au point que les normes actuelles ne sont plus valides.

Densification urbaine
L'avenir immédiat est plus que jamais à vivre en ville :
aussi question de concentration > diminution des coûts de distribution)
le bouleversement climatique devrait augmenter encore la pression migratoire vers un pays relativement épargné tel que la Belgique.
La problématique de la cohabitation pacifique entre communautés différentes (principalement autour de la dichotomie autochtone/allochtone) s'intensifiera donc encore, avec un risque accru de violence urbaine.
La campagne, quant à elle, sert à la production agricole et forestière, aux loisirs… et à "parquer" les immigrants ? Ils pourraient y être exploités comme main d'œuvre bon marché dans l'agriculture, par exemple, ainsi que cela se pratique déjà.

Crises sanitaires
1990 : vache folle années. 2004 : grippe aviaire. 2009 : grippe porcine. 2020 : ?
Autre raison du resserrement de l'ancrage local indiqué plus bas.

Crises économiques
Au vu du graphique ci-dessous, d’ici à 2020, on risque sans doute un ou deux (voir trois) crash :

Quelles conséquence sur le sentiment de sécurité des gens ? Dérive sécuritaire ?

Bouleversement du coût des ressources

Généralités
2 mécanismes sont à l'œuvre :
la raréfaction du pétrole et donc l'augmentation de son coût ;

l'établissement programmé de processus du type "taxe carbone", qui vont faire augmenter le prix des ressources (matériaux et énergie) liées aux énergies fossiles – bien qu'on puisse s'interroger si elle ne serait pas abandonnée à la moindre crise économique.

Conséquences :
 paupérisation et tensions sociales
 resserrement de l'ancrage local

Paupérisation et tensions sociales
- le coût du chauffage (si le mazout est 10 X plus cher en 2020)
- le coût de la nourriture qui implique aujourd’hui beaucoup de pétrole (3 litre par kg de viande)
Tout cela pourrait avoir comme conséquence une hausse du coût de la vie paupérisant une fraction importante de la population - un sentiment d’insécurité pour ceux qui peuvent assurer financièrement - des quartiers “sécurisés” pour riches...
Cette dynamique se rajoute à l'afflux migratoire évoqué plus haut.

Resserrement de l'ancrage local
Un poste de consommation de ressources parmi les plus importants est le transport de matière.
Par exemple, à terme, il deviendra impossible au particulier de payer les mensualités d'une voiture.
Une restriction du transport va mener à des filières productives plus "courtes", resserrant l'ancrage local, à l'opposé de la tendance actuelle à la mondialisation. Cela va redonner une nouvelle importance dans la vie aux communautés locales – ainsi qu'un meilleur aperçu des conséquences écologiques et sociales de ce que l'on consomme.
Par contre, grâce aux télécommunications, l'échange d'informations peut, lui, rester mondial, et donc permettre notamment le partage aisé de connaissances entre ces communautés.
Au niveau du cadre de vie, dans un premier temps, la ville reste, par inertie, celui pour la majorité de la population (cœur de la vie contemporaine grâce à concentration, pour économie d'énergie, vie scientifique, culturelle et sociale), tandis que la campagne est pour la production agricole et les loisirs.

Pour le secteur de la construction :
Cela signifie 2 mutations :
les principales ressources encore disponibles / payables sont d'origine organique non fossile (gérées durablement) et locale ;
les ressources disponibles le seront en moins grande quantité qu'aujourd'hui, de sorte que leur prix sera plus élevé.

 

Énoncé de l'exercice

Site
En ville, pour refléter la réalité de la majorité des humains en 2020.

À Bruxelles, pour solliciter l'ancrage local de l'unité. Voire même fixer un périmètre de x km de rayon autour de l'école au sein duquel il faut travailler ?

Alternatives non retenues :
Densifier en hauteur ? Mais pose des problèmes d'estimation de capacité portante des bâtiments sur lesquels on s'appuie, qui déplace le sujet de l'exercice. Même problème avec les autres formes de réhabilitation de bâtiments existants.
Empiéter sur espaces disponibles (places, parcs) ? Vu l'intérêt apporté à ces espaces pour rendre la ville "vivable", cela semble peu plausible.
Exemple : esplanade de la Cité administrative ? Gérer cohabitation avec :
espace public (vue, jardins) ;
colonne du Congrès, monument patrimonial (bien que sa valeur symbolique s'estompe avec le pouvoir central) ;
cité transformée en logements CPAS (// Brigittines).

Programme

Hypothèse 1 : Atelier
Par exemple de travail du bois (ou silico-calcaire ?) amené par voie d'eau.
Site choisi comme articulation entre lieu de consommation (quartier non patrimonial) et voie de communication (canal ? chemin de fer ?)
Sanitaires, bureau, kitchenette, espace de détente, espace de travail (haut). + zone plantée ?
Attention à l'image commerciale et à l'isolation acoustique.

Hypothèse 2 : Logement
Pour 20 % d'habitants en plus que dans le logement détruit.

Semi-communautaire : à part les chambres, tous les espaces sont partagés, à des degrés divers : sanitaires, cuisine, espaces d'agrément (living, jardin, terrasses), buanderie, unité de biométhanisation sur base de déchets organiques, bureau, atelier, espace de travail pour freeshare, parking pour les 2-roues, etc.
Remarque : il n'y a pas de garage : tous les transports sont supposés être soit en commun (Stib, trains, car-sharing), soit loués (taxis).

Habitants aux profils extrêmement métissés, à tous points de vue : âge, origine, niveau socio-économique.

Dimensions plus grandes qu'actuellement :
pour les espaces communs : pour une flexibilité d'usage et donc une durée de vie allongée ;
pour les chambres : assez grandes car constituent également un espace de vie personnel (mini-salon, mini-bureau, espace de pratique spirituelle, etc.).

Bonne séparation acoustique entre parties jour (espaces partagés) et nuit (espaces privés).

Autres hypothèses de programme :
Centre communautaire multifonctionnel : réunions de cogestion, halle de marché, salle des fêtes, etc.
Lieu de culte multiconfessionnel (mais personnellement je trouve que les religions monothéistes sont précisément des causes de certains problèmes actuels alors ça ne me botte pas plus que ça. Quant à laisser les étudiants débattre de cette perspective, je trouve cela risqué).
Un pont sur le canal (mais personnellement je trouverais bif bof de choisir un ouvrage de génie civil, parce que toute la dimension architecturale est alors absente).

Contraintes

Pénurie de ressources
Le second aspect consiste à répondre au programme avec une quantité limitée (ou en tout cas crédible au regard du scénario de production envisagé) des ressources identifiées comme étant disponibles dans le contexte considéré.
De même, ces ressources ne permettent peut-être pas des éléments disponibles en grande longueur ; par exemple, seulement des planches de bois relativement courtes.

Inclusion des cycles de vie
Déterminer les cycles d'exploitation de ressources : matières organiques, matières inorganiques, eau, énergie, etc.
Tant pour l'exploitation du bâtiment que pour son existence propre :
d'où proviennent les éléments constructifs / les matériaux utilisés pour ériger le bâtiment ?
que deviendront-ils en fin de vie du bâtiment ? Quelle démontabilité ? À quoi ressemblera le contexte à l'issue de la durée de vie choisie pour le bâtiment, et comment s'y inscrira le démantèlement de celui-ci ?

Caractère généralisable
Un caractère utopique est désiré, c'est-à-dire que le système proposé soit soutenable même si l'entièreté de la population mondiale l'adoptait. Cela exclut notamment le sponsoring, ainsi que la récupération pure : pour obtenir une ressource, il faut donner quelque chose en retour. S'il y a quand même récupération, il faut se demander s'il y aurait équilibre entre offre et demande si tout le monde faisait la même chose, et en déduire un prix hypothétique.

De plus :
bâtiment énergétiquement positif, afin de compenser non seulement sa propre consommation énergétique mais aussi celle du bâti ancien, qui ne sera remplacé que progressivement.
récupération de l'eau de pluie > réservoir d'eau (en hauteur, pour avoir de la pression ?).
intégration de la dimension humaine : quel lien au contexte humain ambiant ? Organisation sociale, économique, politique, culture, etc.
lien au contexte non-humain ambiant : vues, nature, bâti, etc.
qualité de la conception architecturale : développer clairement un concept, un discours architectural, avant d'aborder la mise en forme.
accent sur la qualité organique de la conception (synthèse architecture – structure – technologie).
durée maximum de la construction du bâtiment : 10 ans (soit 2030).
ne pas perdre de vue les moyens d'intervention architecturale "non-matériels" : lumière, végétaux, etc.

Annexe : connexions et différences par rapport au 1er exercice :
Il y a aussi réflexion sur l'origine des matériaux utilisés et sur valeur du travail manuel.
Par contre :
 origine exclusivement non-parasitaire des matériaux utilisés ;
 essayer d'imaginer des cycles fermés ;
 plus grande échelle ;
 simulation, non construit.

Organisation pratique de l'exercice

Phase 1 : exploration par groupes
Mieux elle sera menée, plus la phase subséquente de projet sera intéressante et riche.
Durée : 1 à 2 semaines.
Des thèmes d'exploration sont détaillés ci-dessous. On remarque leur interdépendance ; il faudra donc une communication régulière entre les groupes au cours de cette phase.

Le contexte en 2020
Affiner (ou réfuter !) les lignes de force avancées plus haut. La seule invariante est le principe de pénurie de ressources et par conséquent la nécessité d'optimisation.

Le site
Découle d'une réflexion sur la localisation urbaine du programme dégagé.
Pistes de réflexion :
Exploiter le remplacement prévisible (mais progressif) de nombreux immeubles1, trop onéreux à mettre en conformité aux nouvelles normes de comportement énergétique (consommation et production), et non démontables.
Ou exploiter une friche (mais y en aura-t-il encore avec le programme urbanistique actuel ?...).

Les ressources disponibles sur le site en 2020
Dresser une sorte d'atlas des ressources locales, au sens large. Cela inclut donc non seulement les matières premières et l'énergie, mais aussi :
les gens : particuliers, associations (entre autres de quartier), organes officiels, etc., et leurs savoir-faire. On est en relative autonomie, mais pas en autarcie. Ces personnes sont sollicitables par l'argent mais aussi via un réseau d'échanges > de quelles ressources disposez-vous ?
les déchets (ou éléments de récupération) éventuels, par exemple issus de la démolition évoquée plus haut.
Ça peut être de faire pousser sur le terrain de quoi construire le bâtiment, et d'aussi exploiter in fine la terre de la parcelle comme matériau aussi.
Ce recensement peut inclure l'hypothèse de l'établissement d'une filière locale, par reconversion d'acteurs existants (mais doit être au moins aussi rentable qu'avant).

La technologie des ressources identifiées
Usage par le passé (vernaculaire), usage actuel, perspective.

Le programme
Choix et quantification (surfaces au sol, hauteur sous plafond, etc.).

Phase 2 : projet individuel
Alternative non retenue :
on les laisserait choisir la configuration dans laquelle ils veulent travailler ? Avec un nombre maximum d'étudiants par groupe ? Répartition libre dans les groupes, par affinités.

Phase 3 : communication des résultats
Réponse à la question : comment ce projet peut-il contribuer à un "progrès" global ? Penser à la médiatisation de cet exercice.
Outil : blog.
Inviter journalistes au jury (Ecologik, Courrier du Bois, ... ?).

Références à titre indicatif

Taxe carbone
"engagement pris en 2003 devant la scène internationale par le Chef de l'État et le Premier ministre [en France] de diviser par 4 les émissions nationales de gaz à effet de serre d'ici 2050."
http://fr.wikipedia.org/wiki/Facteur_4

"Conseil européen de mars 2007 où l’Union européenne s’est engagée à réduire ses émissions de 20 % à l’horizon 2020."
http://fr.wikipedia.org/wiki/Taxe_carbone_en_France

"Le 21 février 2008, cinq pays — Costa Rica, Islande, Monaco, Norvège et Nouvelle-Zélande — se sont engagés à orienter leur économie vers une neutralité carbone en réduisant fortement leurs rejets de CO2.[1]. Le Costa Rica est à l'origine de cette initiative, reprise par le Programme des Nations unies pour l'environnement. Les pays signataires s'engagent à devenir « climatiquement neutre » d'ici 2021."
http://fr.wikipedia.org/wiki/Neutralit%C3%A9_carbone

"En 2009, des pays comme le Danemark, la Finlande, la Norvège, la Suède ou la province canadienne de Colombie-Britannique appliquent une forme de taxe carbone"
http://fr.wikipedia.org/wiki/Taxe_carbone

"Union européenne
Les 11.000 installations industrielles les plus polluantes sont soumises au système communautaire d'échange de quotas d'émission (SCEQE). Il met en place une limitation des gaz à émettre et un marché du carbone, permettant à chaque entreprise d’acheter ou de vendre son «droit à polluer». Les entreprises qui font des efforts sont ainsi récompensées et les autres pénalisées.
En 2013, il est prévu que ces quotas deviennent payants, ce qui rapproche son fonctionnement d’une taxe carbone."
http://fr.wikipedia.org/wiki/Taxe_carbone

Critiques, limitations :
"La taxe carbone vise à réduire les émissions de CO2, et peut avoir un effet indirect sur d'autres polluants (ceux qui sont directement liés à la combustion de pétrole ou charbon, par exemple), mais elle n'a pas d'effet sur d'autres gaz à effet de serre, comme le méthane. De plus, réduire l'utilisation de combustible fossile favorise l'énergie nucléaire, énergie contestée par ailleurs."
"Cependant, déterminer quelle valeur carbone attribuer aux produits n'est pas simple. C'est un point des plus délicats et l'un des principaux qui expliquent que la taxe ne soit pas encore en vigueur. Dans un premier temps, on peut concevoir de n'appliquer la taxe qu'aux usages non délocalisables, tels que le chauffage domestique ou les transports (à l'instar de la TIPP en France)."
http://fr.wikipedia.org/wiki/Taxe_carbone

"Deux grands secteurs en France ne sont pas encore parvenus à faire décroître leurs émissions : le secteur des transports (très dépendant des hydrocarbures, avec une aggravation liée à la périurbanisation) et celui du bâtiment, notamment du fait de la croissance continue du parc bâti, et de l'apparition régulière d'usages énergétiques nouveaux (ordinateur, sèche-linge, climatiseur, grands écrans plats, veilles...) et en raison du nombre globalement croissant d'appareils électriques ou consommant une énergie fossile.
Si les solutions sont plus difficiles à identifier dans le secteur des transports, celui du bâtiment semble déjà constituer une des clés pour ce défi environnemental, car il offre d'importantes possibilités d'évolutions à court et moyen terme."
http://fr.wikipedia.org/wiki/Facteur_4

Ancrage local
archi vernaculaire ; qu'est-ce que notre terroir ?
villa néolithique au musée de Ramioulx.

Approche "cradle to cradle"
Référence possible : le bureau Rotor.

Biométhanisation domestique en milieu urbain
Voir Cuisine cyclique 1.0 exposée au Micromarché / café ViaVia, Quai à la houille 9, 1000 Bruxelles. www.micromarche.be.
www.intrastructures.net
www.biogas-e.be
www.openstructures.net
" DU 9 SEPTEMBRE AU 1OCTOBRE
CYCLICAL KITCHEN
MICROMARCHE
Le bureau de design « Intrastructures » à élaboré, en collaboration avec l'asbl « biogaz-e », une cuisine qui fonctionne comme une sorte d'un système digestif. Les déchets organiques sont transformés en biogaz, ce gaz peut ensuite être utilisé comme combustible pour cuisiner. Le «ventre», le digesteur lui-même, est conservé à la température de la chaleur résiduelle du réfrigérateur et la boue, le sous-produit du processus de digestion, pourra ensuite être utilisé comme fertilisant. L'installation incarne une combinaison innovatrice de l'art et la science et est actuellement exposée au Centre des arts de la Z33 et Stroom Den Haag. Pourquoi ? Cuisiner produit des déchets et coûts énergétiques, le traitement des déchets est souvent une opération coûteuse et centralisée et l'énergie est de plus en plus une chère. En transformant les déchets en énergie, la digestion anaérobie introduit une nouvelle solution globale pour chacun de ces problèmes tout en même temps de transformer la cuisine en un système plus intégré d'éléments interdépendants.
Le bureau de design «intrastructure» est un bureau de conception de design pragmatique utopique qui génère des modèles, outils et produits pour la restauration sociale et environnementale. « Biogaz-e » vzw est un centre de connaissances autour de la digestion de biogaz, issu de un master sur les études environnementales à Courtrai dans l’ecole Howest."
www.designseptember.be/fr/index.php